LA MER À BOIRE (2024-)
sublimation sur textile, fil de coton 
ENFR

Le 24 novembre 2021, un bateau transportant 30 migrants a coulé dans la Manche alors qu'il tentait de traverser la France vers le Royaume-Uni. Vingt-sept personnes ont été retrouvées mortes, deux ont survécu et une n'a jamais été retrouvée. Miraculeusement capturé par le journaliste Zinar Shino seulement quelques heures après la catastrophe, le témoignage de Mohammed Ibrahimzadeh (un de seulement deux survivants du naufrage) décrit son expérience déchirante, ainsi que l'échec total – et la négligence active et moqueuse – des autorités françaises et britanniques à répondre aux appels à l'aide. 

Grâce à une bourse du Centre Schaeffer, j'ai eu l'occasion d'effectuer des voyages de recherche sur les côtes de la Manche en vue de la réalisation de ces œuvres sur le naufrage. J'ai sublimé sur du tissu translucide les images que j'ai capturées, puis j'ai brodé à la main des extraits du témoignage de Mohammed Ibrahimzadeh en kurde sorani. La broderie n'est pas seulement une pratique importante dans la culture kurde ; c'est un processus laborieux et réfléchi. Cela demande du temps, de l'attention et de la concentration : être proche du détail d'un instant, suspendu dans l'intimité de chaque mot. 

Ces pièces ont vécu avec moi pendant des semaines, tandis que je les cousais soigneusement, tirant la mer entre mes mains. Les tissus éphémères se superposent et refluent les uns sur les autres, révélant les toiles de fils derrière. En l'absence d'archives formelles, l'eau se pose en témoin : servant non seulement de reliquaire aux vies perdues, mais aussi de dépositaire de leurs souvenirs.
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